ABIDJANAIS

Quand les élus locaux ne comptent que sur le Président de la République…

L’actualité en Côte d’Ivoire la semaine dernière était sans doute la visite du chef de l’Etat Alassane Dramane Ouattara à Bouaké. ADO, comme on l’appelle chez nous ici à Abidjan, était en effet dans la région du Gbêkê – au centre de la Côte d’Ivoire – pour une visite d’Etat. Pour cette visite, Bouaké a repris fière allure et mérite désormais son nom d’antan, « la seconde ville de la Côte d’Ivoire ». Mais le jeune ivoirien et abidjanais que je suis, tout en approuvant le contexte de cette visite, se pose des questions sur certains autres aspects de cette dernière; Je pointe du doigt nos élus locaux.

Le fait pour Bouaké de recevoir le Chef de l’Etat était très attendu par la population, vu le nombre de personnes présentes au stade municipal de Bouaké, le jour du dernier meeting du Président Ouattara. Les populations l’attendaient parce que, de ma mémoire de jeune ivoirien né dans les années 80, la visite d’un chef d’Etat ivoirien en fonction à Bouaké date de belle lurette. Président Ouattara en le faisant, valorisait ainsi cette région «délaissée» par ses prédécesseurs. Il était donc important de lui rendre la part belle en se mobilisant massivement pour la réussite de cette visite.

Je suis Baoulé (une ethnie de la Côte d’Ivoire), fils de la région, donc je connais un peu notre mentalité. Le Baoulé aime les honneurs. Et quand tu lui fais honneur, il te la rend de la plus belle des manières. Cela se justifie donc. Mais cette mobilisation se justifie aussi par le fait que, de l’argent (une belle somme je le signale) a été injecté dans les préparatifs de cette visite pour  la réhabilitation de certaines infrastructures. Des villages ont même été électrifiés et fournis en eaux courantes. Il faut donc être des ingrats pour ne pas réserver un accueil chaleureux à celui par qui cela est arrivé. Cette visite, il faut le reconnaître, a fait beaucoup de bien à cette région. Cela montre que le pays est vraiment «recollé». Mais une question d’une amie, originaire de San Pédro (dans le sud-ouest de la Côte d’Ivoire) a attiré mon attention. « Donc il faut que le Président se déplace dans une région pour que les infrastructures de cette région soient réhabilitées quoi ? » m’a-t-elle demandé le plus simplement possible.

Je me suis donc rendu à l’évidence qu’en tant que bon africain, je n’avais pensé qu’à moi, ma région et ses villages environnants. J’avais oublié que mon pays comptait  31 régions et que le Président de la république n’allait pas certainement pouvoir faire le tour de toutes ces régions. Question donc ! Quels rôles jouent effectivement nos élus locaux dans leurs Districts, conseils généraux et mairies ? S’il faut attendre la visite du chef de l’état pour penser au développement économique et social des régions, je pense que cette histoire d’ «émergence à l’horizon 2020 » est une utopie. L’inactivité de nos élus locaux est en effet un frein à cet objectif. Mais je comprends aisément cette inactivité non sanctionnée électoralement par les populations de ces élus locaux pour ne pas dire ces «Elus pour soi». Nous sommes une population à 51% analphabète (selon l’UNESCO). Et l’africain analphabète ne pense qu’à son ventre; une fois rassasié il ne pense plus à son devenir sur une longue durée. Ces «élus pour soi», ayant compris cela, reviennent chaque fois vers la fin de leurs mandats pour faire don de quelques sacs de riz, des bidons d’huile, un peu d’argent liquide et hop le cycle reprend. Cinq nouvelles années et attendre que le chef de l’état fasse un geste pour le développement socio-économique de la région. Quel dommage! 

J’espère que certains d’entre vous comprendrons ce proverbe Baoulé sur lequel je finis ce billet: « Si tu es dans la même pirogue qu’une personne et que tu perces cette pirogue, vous risquez de vous noyer tous les deux. »

Visite du chef d'état à Bouaké
Visite du chef d’état à Bouaké


Sport en Côte d’Ivoire: Lettre ouverte à Sabri Lamouchi

Sabri Lamouchi

Après la qualification des Éléphants de Côte d’ivoire à la coupe du monde de football 2014 au Brésil, le jeune abidjanais que je suis, fan du football, amoureux de son équipe nationale, écrit une lettre fictive à Sabri Lamouchi, le sélectionneur de l’équipe nationale de football de Côte d’Ivoire. Et cela se fait dans un esprit fair play et comique.

 Bonjour Coach Sabri,

Je suis presque certain que tu t’attendais à une lettre de ce genre venant de la part d’un ou de plusieurs ivoiriens. Si certains l’ont déjà fait, lis aussi la mienne car elle ne sera pas de trop. Je tiens d’abord à te dire merci d’avoir rempli ta mission. En effet, le 28 mai 2012 quand tu prenais la tête de notre équipe nationale, ta mission était de nous qualifier pour le mondial brésilien. C’est chose   faite, merci donc! Quelle est donc ta prochaine  mission avec la Dream Team de l’Afrique en matière de football ? Ne me dis pas que c’est de gagner la coupe du monde en tout cas. Je n’aime pas trop tout ce que les ivoiriens disent de toi ; mais à y regarder de très près, ils n’ont pas totalement tort. Bon nombre d’entre nous (les passionnés de football en Côte d’Ivoire) a contesté ta nomination à la tête de nos pachydermes sous prétexte que tu n’avais jamais entrainé une équipe nationale avant la notre, donc tu étais sans expérience. Quand j’ai appris que ton copain  Sidy Diallo t’avait préféré à de grands entraîneurs de renom, j’ai tiqué et même failli piquer une crise. Je savais qu’il allait être difficile de faire de grandes choses avec toi. La preuve, notre élimination en quart de finale contre le Nigéria alors que tous les observateurs du monde du football nous accordaient au moins la finale de la CAN 2013. Mais comme tu ne t’appelle pas Zahui, ton copain Sidy t’a défendu mordicus nous faisant savoir qu’il ne t’avait jamais demandé de gagner la coupe d’Afrique, mais plutôt de nous qualifier pour le mondial brésilien. Puisque tu as réussi ta mission et que je t’aime bien, je vais te donner un conseil de petit frère. Avec ce style jeu – je dirais même avec ce jeu décousu – que tu as donné à notre équipe, je te promets que nous ne pourrons pas obtenir un seul point au mondial, donc démissionne. Tu as en mémoire ton premier vrai test contre le Mexique non? Le 14 août dernier Mexique nous battait 4-1, juste pour te rappeler. Pour éviter le ridicule au Brésil, je te conseille de partir de la tête des Eléphants. Il y a plusieurs ivoiriens qui pensent comme moi hein. La preuve, une page Facebook créee pour ton départ fait le buzz actuellement. Ahi tu ne savais pas quoi ! Clique ICI pour voir combien de fois les ivoiriens veulent que tu partes. Je suis Community Manager donc je suis bien placé pour te dire qu’une page Facebook qui fait environ 9000 fans en moins de trois jours sans promotion, c’est vraiment rare. En tout cas moi tu ne m’as pas encore convaincu avec les Eléphants. Bon je ne vais pas être trop long. Je sais que mon message est suffisamment clair ; mais comme j’ai tes contacts, je saurai t’écrire toute fois où j’aurai quelque chose d’autre à te dire. Réfléchis bien et quitte la tête de l’équipe de Côte d’Ivoire pour le na pas te  faire humilier…

 Un homme prévenu en vaut deux !!!!  

 


Afrique, si nos hommes politiques savaient s’arrêter…

Si je demande à chacun de vous de me donner une définition au groupe de mots « grand homme », les réponses diffèreront certainement d’une personne à l’autre. Pour moi, un « Grand homme », c’est celui qui naît  devient une référence pour sa génération et laisse ses traces dans les archives de l’humanité afin que les générations après lui, puissent s’en servir comme modèle. Jésus Christ, Bouddha, Mahomet, Einstein, Molière, Pélé, Lincoln, De Gaulle sont ceux qui me passent par la tête au moment où j’écris ce billet. Il y a peu de cela, j’ai ajouté un autre « grand homme » sur ma liste ; Usain  Bolt ! Pourquoi ? A Bruxelles, dans le cadre du meeting de la Ligue de Diamant, « l’hommefusée », a expliqué qu’il songeait à se retirer après les Jeux Olympiques de Rio de Janeiro en 2014. « Je pense que ça serait le moment idéal, en étant au top et après avoir dominé pendant de longues années (depuis 2008 sextuple champion olympique et huit fois champion du monde, détenteur de trois records du monde : 100 m, 200 m et 4 × 100 m) », a confié le Jamaïcain, dans des élocutions rapportées par le quotidien sportif l’Equipe. Voici un Monsieur qui a compris que dans la vie, il faut savoir se fixer des objectifs, se donner les moyens de les atteindre et se retirer avec tous les honneurs et la notoriété quand on n’y est parvenu.

 Politiciens africains, emboîtez-lui le pas !

 Si nos hommes politiques en Afrique – à un degré moindre dans les pays anglophones – pouvaient respecter cette logique qui est un chemin sûr pour rentrer dans l’histoire ! Combien sont-ils ; ces hommes politiques africains qui se retirent de la scène politique de leur propre  gré ? Je ne saurais vous le dire ! J’espère vivement que nos jeunes politiciens qui se battent aujourd’hui  pour ravir la place aux dinosaures politiques, ne viendront pas nous chanter ce refrain que nous connaissons déjà : « Le temps qui nous était imparti était peu devant les objectifs que nous nous étions fixés » ou encore « Nous avons trouvé le pays dans un état que nous n’espérions pas ». Laissez-moi vous dire messieurs, que le temps ne suffira jamais à l’être humain. C’est plutôt à lui de s’imposer  des limites. Vous gagnerez donc à suivre l’exemple de ce jeune  jamaïcain !

Crédit photo africatopsports.com
Crédit photo africatopsports


En Côte d’Ivoire les décisions prises par l’Etat ne sont jamais appliquées

Les gouvernements africains fonctionnent différemment de ceux des pays dits développés. Dans ces Etats les problèmes sont analysés de fond en comble avant toute prise décision. Ce qui n’est pas toujours le cas sur notre continent noir. En Côte d’Ivoire par exemple, des décisions d’interdiction sont prises au sommet de l’Etat, et quand il s’agit de les appliquer, c’est le jour et la nuit.

Des décisions prises et non appliquées

En avril dernier, l’on nous annonçait, l’interdiction de fumer dans les lieux publics. C’est avec joie que certains citoyens conscients des dangers du tabac ont accueilli cette bonne nouvelle. Tandis qu’ils s’extasiaient et ne tarissaient point d’éloges sur le bien-fondé de cette mesure, certains d’entre nous, plus réalistes, avaient planché sur les méthodes et infrastructures dont disposait l’Etat de Côte d’Ivoire pour que cette décision soit respectée. Nous étions dans le vrai ! Dans la mesure où jusqu’à ce jour (6 mois après) rien de concret n’a été fait pour la mise en pratique de cette résolution. Les fumeurs continuent de nous pomper l’air, détruisant au passage notre santé, avec leur fumée. Jusqu’à présent, je n’ai vu personne payer une amende pour avoir fumé dans un lieu public.

 Quelque mois plus tard, ce sont les taximètres qui par une grève, protestaient contre les autorités, qui peinent à prendre des mesures répressives, contre les voitures banalisées communément appelées « Wôrô-Wôrô ». Ces derniers, menacés depuis des mois, de mise systématique en fourrière par le ministre Hamed Bakayoko, continuent à circuler en toute impunité dans la ville d’Abidjan, sans que la menace ne soit mise à exécution. De quoi énerver les professionnels des transports… Encore une fois, une décision prise sans être appliquée !

Quid des nouveaux décrets pris par le gouvernement

Puis ce fut le coup du décret n°2013-327 du 22 mai 2013 portant interdiction de la production, de l’importation, de la commercialisation, de la détention et de l’utilisation des sachets plastiques pris par le président de la République de Côte d’Ivoire.  Ici encore la machine a coincé (si je m’en tiens à la presse abidjanaise). En effet, « la mise en vigueur de ce décret pris depuis le 22 mai sera pour ce 22 novembre » selon le quotidien Nord-Sud du 5 octobre 2013. La dernière née de toutes ces décisions gouvernementales est l’interdiction du téléphone portable au volant – adoptée le vendredi 18 octobre à l’issue d’un Conseil des ministres extraordinaire. Sur cette décision, j’ai quelques petites questions à poser. De quels moyens disposent les forces de l’ordre pour prouver qu’une personne était en communication au volant ? N’est-ce pas là une histoire de « ta parole contre la mienne » ? Puisque je suis (et beaucoup d’autres personnes aussi, j’en suis sûr), en mesure de supprimer les derniers appels de mon téléphone en une fraction de seconde ? Mon téléphone me sera-t-il confisqué pour analyse ? J’image déjà la lutte qu’il y aura lorsque les agents de police voudront prendre les téléphones pour vérification des derniers appels…

Il est vrai que l’Oser (l’Office de la sécurité routière) nous apprend que 10 % des accidents de la circulation en Côte d’Ivoire impliquent une conversation téléphonique. Mais je pense qu’il faut s’assurer des moyens de répression avant de prendre ce genre de décision. Ce n’est pas parce que l’Occident prend certaines résolutions en fonction de son niveau d’évolution que nous, Africains, devons en faire autant ! Nous devons tenir compte de nos réalités propres. Quand, l’Afrique en finira avec le suivisme aveugle ? Africains, revoyons nos comportements copistes !

Et vous, quel est votre avis sur le problème ?


Retrait de la CPI: Ma lettre aux présidents Africains!

Les 11 et 12 octobre, des chefs d’états africains se sont retrouvés à Addis-Abeba pour des échanges au cours d’un sommet extraordinaire. L’objet principal était le retrait des pays africains de la Cours Pénale Internationale (CPI). D’un regard lointain, le jeune Abidjanais que je suis, écris une lettre fictive aux présidents africains pour leur faire part de ce que je pense de cette décision.

Chers Présidents,

Vous recevez ce courrier parce que vous avez eu une attitude que je n’arrive pas à comprendre. Pourquoi voulez-vous vous retirer de la CPI? Je suis certes très jeune, mais quand je dois prendre une décision importante de ma vie, je réfléchis à plusieurs reprises. Je peux même réfléchir pendant une semaine, alors que certains le font en une journée. Je suis choqué de savoir que, ce n’est qu’après plus de 10 ans que vous vous rendez compte que vous vous êtes « faits avoir » par l’occident qui ne condamne que des africains à la CPI. Est-ce à dire que nos leaders politiques africains prennent des décisions avant de bien réfléchir et comprendre les contours et les pourtours « des pièges » que l’occident leur pose? Je vous le dis en toute franchise; je ne veux pas que vous vous retirez de cette CPI. Cela serait une honte pour vous-même. Il faut avancer clairement vos inquiétudes et vous battre pour que nous n’ayons pas droit à seulement une CPA – Cours Pénale Africaine – mais plutôt une VRAIE CPI. Ils penseront (les occidentaux) que votre retrait est pour encourager l’impunité chez nous en Afrique. D’ailleurs même, est-ce que ce retrait massif est possible; quand je sais que vous n’êtes même pas solidaires? Pendant que certains d’entre vous, ne faisant pas confiance à leurs mécanismes judiciaires nationaux, ne jurent que par la CPI, d’autres pensent que la CPI sert d’outil politique. Laissez tomber cette histoire de retrait s’il vous plait. Pensez-vous que la Côte d’Ivoire, le Botswana, le Malawi ou encore la RDC sont prêts à vous suivre dans votre volonté d’abandonner la Cours de Madame Bensouda ? Je ne pense pas. Monsieur Uhuru Kenyatta, vous et votre allié Sud africain, vous pouvez vous retirer ; mais ne comptez pas sur vos collègues des pays précités pour vous suivre. Vos intérêts sont divergents; il est donc mieux d’agir en solitaire, plutôt que de vouloir un mouvement de masse. Et puis encore, dites-moi s’il vous plait messieurs, avez-vous signé en un mouvement de masse ou individuellement? Si oui pour le mouvement individuel, pourquoi voulez-vous alors aujourd’hui un mouvement de masse pour le retrait ?

Je ne vais pas continuer à vous ennuyer avec ce discours de jeune africain, qui pense que la VRAIE AFRIQUE va naître avec notre génération et non celle des béni-oui-oui de l’occident que sont nos leaders actuels. Ces dirigeants qui ne pensent qu’à leurs intérêts personnels avant de penser à ceux de leurs peuples ; c’est leaders qui voient leurs opposants en des ennemies qu’il faut éliminer ou mettre en quarantaine et non en des adversaires qu’il faut dominer par les idées et des actes de développement. Bref ! Je sais que mon mot ne comptera pas; mais que celui qui a des oreilles entende ce que Abidjanais a dit.

Vignette Union Africaine
Crédit image: tv5